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Location et clauses abusives : l’exemple de la clause de solidarité

Cass. Civ III : 12.1.17
N° de pourvoi : 15-15175

Dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui  ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties (Code de la consommation : L.212-1). La Cour de cassation a déjà eu l’occasion de sanctionner une clause abusive dans le domaine des rapports locatifs : elle a ainsi retenu que « la clause qui fait peser sur le locataire la quasi-totalité des dépenses incombant normalement au bailleur et dispense sans contrepartie le bailleur de toute participation aux charges qui lui incombent normalement en sa qualité de propriétaire, a pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat » (Cass. Civ III : 17.12.15, cf. Habitat actualité n°149). À noter que la loi du 6 juillet 1989 fixe une liste des clauses interdites dans les baux d’habitation et ce, quelle que soit la qualité du bailleur (professionnel ou non professionnel) : elles sont réputées non écrites (loi n°89-462 du 6.7.89 : art. 4). Pour retenir qu’une clause de solidarité contenue dans un bail d’habitation conclu entre un Office public de l’habitat (OPH) et deux locataires, est abusive au sens du droit de la consommation et en conséquence nulle et non écrite, une Cour d’appel a retenu que :

  • ­la clause était discriminatoire, les colocataires étant traités de manière différente par rapport aux couples mariés ou pacsés ;
  • ­ elle entraînait un déséquilibre entre les droits des preneurs et ceux du bailleur car ce dernier pouvait invoquer la clause à tout moment sans limitation de durée.

La Cour de cassation rejette ces arguments en rappelant que :

  • ­"tous les co-preneurs solidaires sont tenus au paiement des loyers et des charges jusqu’à l’extinction du bail, quelle que soit leur situation personnelle", que la solidarité soit légale (époux) ou conventionnelle (colocataires) ;
  • ­"la stipulation de solidarité […] n’est pas illimitée dans le temps", car elle s’éteint à la fin du bail.

Aussi, si la Cour de cassation n’a pas exclu l’application des règles relatives aux clauses abusives, elle a toutefois refusé de caractériser celle qui lui était présentée comme étant abusive.

Un autre point était discuté autour de la règle selon laquelle la solidarité ne se présume pas (Code civil : art. 1310). En effet, la clause qui la stipule doit être précise quant aux créances concernées. En l’espèce, la Cour d’appel a retenu que la clause de solidarité était imprécise car elle n’énonçait pas la liste des créances exclues du champ de la solidarité. La Cour de cassation rappelle simplement sur ce point que lorsqu’une créance (en l’espèce, les indemnités d’occupation) n’est pas visée par la clause de solidarité, cette dernière ne s’y applique pas.

Enfin, il est à noter, s’agissant de la solidarité des colocataires, que l’article 8-1 de la loi du 6 juillet 1989 (modifié par la loi ALUR et la loi pour la croissance l'activité et l'égalité des chances économiques) prévoit désormais que la solidarité du colocataire ayant quitté le logement s’éteint à la date d’effet du congé lorsqu’un nouveau colocataire figure au bail. À défaut, elle s’éteint à l’expiration d’un délai de six mois après la date d’effet du congé. Cette disposition ne s’applique pas aux logements du parc social (loi n°89-462 du 6.7.89 : art. 40 I, II et III).

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